Complémentaire au retail, le Virtual Shopping est un service idéal pour les marques qui souhaitent enrichir leur expérience client et attirer de nouveaux consommateurs. Un outil efficace, à condition d’en exploiter toutes les facettes.
Alors que le Live Shopping tire son inspiration du concept de télé-achat, depuis modernisé et digitalisé, le Virtual Shopping se différencie par le caractère virtuel de l’environnement dans lequel l’expérience client se déroule. Comme l’explique Nicolas Rebet, expert retail luxe et fondateur de Retailoscope, « Dans le Live Shopping, ce sont des êtres humains qui se filment ou se font filmer pour vendre un produit à travers un écran, tandis que le second permet aux clients d’évoluer dans des environnements créés de toute pièce pour acheter un produit ou un service, sans interaction humaine, au moins en première intention ». Le terme recouvre aussi bien les déclinaisons sur les sites e-commerce, les services mis en place en point de vente physique, et le Virtual Shopping dans le métavers. « Dans le cas de Gucci Town par exemple, le client évolue dans un monde virtuel, les produits achetés sont destinés à y rester. La frontière avec le monde réel est nette ».
Virtual Shopping et Virtual Try On.
« Le Virtual Try On fait partie du Virtual Shopping, c’est un outil qu’on utilise pour projeter un produit sur le client, tandis que le Virtual Shopping englobe une notion plus large, celle d’une boutique qu’on va entièrement digitaliser et dans lequel le client évolue » précise Nicolas Rebet.
Concrètement comment cela fonctionne ? Grâce à un mécanisme de filtre, l’objet – ou son résultat lorsqu’on parle par exemple de maquillage – est projeté en 3D soit dans un environnement spécifique (la table de votre salon par exemple), soit sur un avatar pour avoir une idée précise du rendu. « Le Virtual Shopping ne nécessite pas forcément la création d’un avatar pour représenter le client. Très souvent, l’expérience se limite encore à de la navigation dans un lieu défini, qu’il soit une parfaite réplique d’un point de vente physique ou, au contraire, d’un lieu plus onirique ». Actuellement, c’est dans l’univers de la cosmétique que la technologie est la plus aboutie, des maisons comme Chanel ou les marques du groupe L’Oréal – avec les différentes déclinaisons de Modiface – tiennent le haut du pavé, tandis que dans la mode, l’élève peut encore mieux faire.
Un outil marketing qui se révèle être un formidable argument RSE.
Face à ce constat, plusieurs start-up ont développé des solutions technologiques innovantes. Depuis la pandémie, l’online est devenu une priorité pour les marques de luxe, qui cherchent autant à fidéliser sur ce nouveau canal, qu’à attirer la jeune génération.
Incubée à Station F, KlipFit a développé une solution permettant, à partir de deux photos, de calculer les mensurations d’une personne et de les convertir en une estimation de taille de vêtement. Un outil de pointe, développé en partenariat avec le laboratoire de Computer Vision de l’École des Mines, qui vient s’emboîter comme une brique digitale au site e-commerce de la marque partenaire. « KlipFit permet à la fois d’améliorer l’expérience client en supprimant l’étape fastidieuse des prises de mesure à la main, et d’impacter le taux de retour des marques ». Un argument de poids pour le secteur de la VAD, dont les taux de retour oscillent entre 25% et 40%, sachant que 70% d’entre eux sont justifiés par un problème de taille » développe Federico Fortis, co-fondateur de KlipFit. Un marché estimé à 975 millions d’euros en France. Si pour l’instant, la solution se limite à recommander au client la taille la plus adéquate, à terme, l’entrepreneur souhaite aller plus loin en générant l’avatar du client pour maximiser l’effet de scénarisation.
De son côté, Retail VR a su séduire les marques avec sa plateforme de commerce 3D de création de lieux virtuels. L’entreprise s’adresse aussi bien aux marques en BtoB pour leur activité de merchandising, qu’en BtoC pour toucher le grand public. « C’est souvent par la porte BtoB que les marques nous approchent, car elles souhaitent améliorer l’expérience client de leurs acheteurs lors des présentations des collections. Les économies réalisées sur les coûts logistiques et le foncier pendant les Fashion Week, et surtout l’impact RSE, finissent de les convaincre de sauter le pas pour le reste » avance Erwan Krotoff, le CEO de Retail VR. L’entreprise, qui a signé un partenariat avec la plateforme The New Black, veut accélérer sur le BtoC. « L’objectif est d’accompagner les marques de mode et de luxe par la création d’univers immersifs totalement personnalisés, dans lesquels le client peut naviguer et effectuer ses achats dans le même temps, puisque nous sommes connectés à Shopify, Magento et Prestashop ».
S’il existe encore un décalage entre les produits réels et la qualité de leurs pendants digitaux, force est de constater que les services de Virtual Shopping se développent à vitesse grand V. La raison ? « En intégrant l’interaction sociale par le biais des avatars dans le digital, le Virtual Shopping comble les faiblesses de l’e-commerce au regard du point de vente physique » analyse Erwan Krotoff.
Autre avantage, ce type de technologie permet, si le client est amené à se connecter pour profiter de ce service, de collecter de la data, donnant ainsi aux marques une connaissance plus fine des envies de la clientèle. Un éclairage précieux pour faire évoluer les collections et affiner la gestion de stock. « A l’inverse, en point de vente, le Virtual Shopping fluidifie la circulation en donnant aux clients la possibilité de faire l’impasse sur l’essayage en cabine » commente Federico Fortis. Du temps gagné, qui peut être utilisé par le vendeur pour personnaliser la visite du client.
Pour tirer profit au maximum du Virtual Shopping, l’expert retail Nicolas Rebet recommande aux marques de développer le call to action associé à ce service pour convertir cet outil marketing en outil de vente. « Autrement, cela reste une porte d’entrée supplémentaire pour découvrir la marque, et faire connaître ses produits, notamment en période de lancement, ce qui est déjà intéressant ! »
Si le Virtual Shopping est appelé à prendre une place de plus en plus importante dans les canaux de communication et de vente des marques, sa mise en place requiert une attention particulière. Il faut veiller à ce qu’elle se fasse dans le cadre d’une stratégie cohérente avec les codes de chaque maison. « Le luxe est un univers qui fait appel aux sens, au savoir-faire, à la transmission, et à l’émotion. Le Virtual Shopping doit faire appel à ces fondamentaux, pour que ce touch point avec le client atteigne son objectif : celui de le faire rêver, avant de vouloir le faire acheter » conclut Emmanuelle Rigaud, Professeure de marketing à SKEMA Business School. À méditer.